Un maelström de rire et de coups

Je vous remercie chaleureusement pour l’après-midi que vous m’avez permis de passer avec vous au Goûter du Divin Marquis. Je me sentais bien à vos côtés, privilégié, protégé par votre collier.

C’était ma première expérience en public. Arrivé au Goûter, avec vous, mon appréhension se dissipe rapidement en vertu d’une loi longtemps observée : la liberté des uns facilite et encourage celle des autres. Une galerie de corps, parlant, allant, habillé fétiche ou non. Dénudé partiellement ou non.

/… /

Hier après-midi, vous m’avez fait découvrir un plaisir inédit : « porte-manteau », « tête de piano », « chêne »… c’est par ces mots que vous vous amusiez de moi auprès de certains convives. /…/. Je prenais un malicieux plaisir à vous observer détruire sans effort toute possibilité d’élan vaniteux. Vulnérable auprès de tant d’inconnus et couvé par votre bienveillance que vous ne pouvez trahir. Mon seul regret : votre corset que je n’ai pas réussi à lacer correctement. Je m’en veux d’avoir abîmé d’un détail le soin que vous apportez à votre art de vivre, sachant que le détail fait tout chez vous, et que c’est là qu’il se cache, dit-on.

Vous m’avez finalement invité à monter pour jouer… Je monte seul. /…/

Puis nous avons joué. Avec vous, difficile de dominer d’en bas. Je voulais me ruer sur mes chaînes, me livrer mais vous balanciez le métronome au rythme qui vous convient. Frustration délicieuse. Vous avez fini par me traiter comme un chien : éducation pavlovienne. Associer la bandaison d’un pénis au cliquetis de mousquetons, je tiens cette idée comme plus profondément perverse que les 120 journées de Sodome. Il y a quelque chose de violemment déshumanisant, presque criminel, à aborder une personne d’un point de vue strictement mécanique, donc, naturellement, je riais avec vous…

La suite fut un maelström de rire et de coups, autour desquels tournoyait votre esprit-éclair. Il m’arrivait de me retourner pour observer votre maintien, vos jambes, votre posture, votre science. J’élaborais aussi la mienne… Lorsque vous plantiez vos dents dans mon bras, je sentais votre mâchoire, j’essayais de pressentir et de visualiser l’ensemble de votre crâne selon l’angle et la force que vous appliquiez…

Sur la fin, la douleur était exquise, mon corps brûlait. Vos coups de canne m’étaient sévères. Ce n’était pas le lieu pour, mais au fond de moi je désirais l’absolu. Assis dans une cathédrale, le jour prend fin. La nuit vient supprimer les vitraux un à un. De même, je désirais que chaque coup de canne devienne plus sévère et vienne supprimer mon rire, mon orgueil, ma fierté, ma vanité, qu’il ne reste qu’une ultime supplication pour reconnaître votre souveraineté. Je vous prie de n’y voir là aucun désir mortifère, seulement le vœu dangereux de contempler deux solitudes se faire face. Cette solitude partagée, difficile à contempler de face, vous l’avez simplement et parfaitement formulée lorsque vous m’aviez dit ne pas ressentir ma douleur. Douce vérité. Plus j’avais mal, plus je désirais me fondre dans cette vérité. Mesurer l’infinie distance qui nous rapproche et nous sépare.

Je garde sur mes fesses et le haut de mon dos plusieurs marques. A mon bras gauche – que vous avez mordu avec acharnement – un grand hématome rouge couvre une large part, les bords sont bleus, il est traversé d’une nébuleuse violette et bleu foncée. Avant de dormir c’était une petite tache d’encre rouge au centre de la trace de vos dents. Puis la nuit. Puis l’éclosion. Juste au-dessus de l’hématome une légère coupure courbe me fait penser à une dent.

 

Témoignage de D.

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