Il s’est pesamment laissé tomber sur la banquette, je l’ai regardé et me suis aussitôt illuminée comme une guirlande de Noël. Il portait un grand blouson, une grande écharpe et un si grand corps sur de si petits pieds.
Mes mains jusqu’alors sagement croisées sur mes genoux ont commencé à s’agiter. La droite, surtout, celle qui se met à tourner lorsque mes pensées, le désir ou les images commencent à s’entrechoquer trop fort.
Hands, be still!

Les stations défilaient alors que je contemplais son profil d’Asie, mongol ou chinois. Il avait des yeux proéminents d’amandes amères et des cheveux jais, courts et drus comme des baïonnettes qui laissaient voir la porcelaine de son scalp. Mais surtout, à l’arrière du crâne, comme une ligne d’horizon coupant une vallée blanche, comme une chatte de femme en longue virgule, il avait un pli de gras parfait.Je scintillais depuis ma place, fascinée, bouche entrouverte, à me serrer les pouces sous mes gants. Il faisait froid ce jour-là mais lui, il avait chaud. Il étouffait, même, d’avoir dû hisser sa masse dans la rame avant de se trouver une place. L’effort avait été si intense que la sueur jaillissait de ses pores comme une fontaine vive, du front à l’occiput, avant de rouler sous le col de son manteau.
Hands, be still!

Les cahots faisaient tressauter sa chair et mes doigts. Ah, juste toucher-empoigner-pétrir-fouailler-embrasser-mordre. Mon empire pour mon index qui s’avance, tendu, fend l’air qui nous sépare, s’introduit et coulisse, avant-arrière-avant, dans ce tunnel de chair moite.
Mon index barbare en instrument de jouissance. Mon index que ses neuf acolytes ont maintenu raide dans mon giron. Parce qu’ici encore, c’est moi qui commande.
Hands, be still.

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