C’est notre troisième rendez-vous. Il a émis un voeu pour qu’il soit très spécial : il voudrait deux Dominatrices pour s’occuper de lui. J’ai répondu que bien sûr, c’était possible, et j’ai demandé à Mademoiselle.
Le voilà entièrement nu, à genoux sur mon tapis, le sexe et les yeux bandés. Je lui chuchote qu’il est temps d’accueillir notre invitée. Je frappe dans mes mains, deux fois, très fort.
– Maintenant !
Ma voix traverse le boudoir. Il tressaille lorsque des bruits de bottes se rapprochent, pénètrent dans le couloir puis le salon. Mademoiselle apparaît dans toute sa gloire sanglée de cuir, Amazone guerrière devant lui, l’aveugle à genoux qui ne peut pas la voir.
Lorsque le jeu se termine, qu’il est allongé dégoulinant de sueur et de foutre, je dis :
– Il est temps de dire au revoir à Mademoiselle.
– Au revoir, Mademoiselle, répète-t-il, docile.
Mademoiselle incline la tête avec grâce et quitte le boudoir sans un mot. Le cliquetis de ses talons décroît, boudoir, salon, couloir, avant de s’effacer derrière le claquement sec de la porte d’entrée.
Au moment du verre d’après-jeu, il dit, une lueur d’admiration, d’envie peut-être dans ses yeux sombres :
– C’est fou, votre vie… Ces femmes qui apparaissent et disparaissent sur un geste…
Je réponds que oui, ma vie est peuplée d’apparitions réservées aux hommes qui arrivent et repartent sur rendez-vous. Une seconde je me vois en Aladdin qui frotte sa lampe de laquelle abracadabra, le génie jaillit, ou en magicienne qui tire de son inépuisable chapeau des colombes et des lapins.
Ce qu’il ignore, c’était que Mademoiselle n’est pas partie. Elle se tient cachée juste à côté, escamotée par un rideau.
Chaque magie a ses secrets.
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