Il a signé son mail de présentation de deux noms, Julien et Bijou. Je lui ai répondu d’un « Bonjour Julien, bonjour Bijou », qui n’a pas manqué de le faire réagir :
« Madame,
Comment préféreriez-vous m’appeler ? Julien ? Bijou ? Ou encore un autre surnom ? Je vous laisse choisir. »
J’ai pensé aux croyances primitives qui posent que nommer, c’est prêter naissance et que rien n’existe sans le Verbe,
J’ai pensé que sauf à faire de Julien mon jouet, je ne lui choisirais pas une autre identité, car donner un nom engage une forme d’intimité, si ce n’est un lien,
J’ai pensé à têtagifles, dont l’initiation remonte à une presque année, au nom civil par lequel il s’est présenté à moi et ce surnom que, moi, je lui ai choisi la première fois.
J’ai pensé aux réalités qui coexistent et à celles qui, dans L’Alambic, s’absentent l’espace d’une rencontre, aux hommes sociaux qu’ils sont, mes clients,
mariés,
en couple,
divorcés ou célibataires endurcis,
hétéros-bi-homos-hétérhomos,
en costume-cravate ou en jeans-pull,
avec leurs peurs de s’être adressés à une Dominatrice qui serait une arnaque, leur peur de me déplaire, d’avoir trop mal ou pas assez, de jouir trop vite ou pas du tout,
toutes ces questions-attentes-appréhensions qui polluent leur tête, à eux qui chez moi viennent chercher le silence, l’abandon, l’apaisement de toutes ces voix qui piaillent-brament-cornent-exigent-commandent,
allez, j’ose, l’ataraxie,
ces hommes raisonnables et raisonnés que je m’efforce de dépouiller, non de leur argent mais de leurs couches d’oignon, éducation-croyances-décence, pour plonger dans leur boîte noire, au coeur même du réacteur.
Aussi ai-je répondu :
« Bonsoir Julien, bonsoir Bijou,
J’utilise pour le moment les deux noms car je m’adresse aux deux parties de vous : Julien, l’homme de 34 ans qui me lit avec une distance critique et Bijou, votre part soumise qui anticipe déjà nos jeux et le plaisir qu’elle va en tirer. »
« Madame,
Votre réponse sur le choix du nom est magique, vous m’avez parfaitement compris : en moi il y a le Julien qui voudrait vous poser mille questions pour se rassurer sur le contenu de notre future séance, et la Bijou qui, si elle le pouvait, se jetterait à vos pieds, esclave liée à vous par un contrat d’appartenance. »
Bingo.
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